« Je rêve d’un livre »

Manifeste-incertain-Frederic-Pajak

Alors je reprends le Manifeste, sachant obscurément qu’il n’aura pas de fin. J’amasse des centaines de pages de carnets : bribes de journal, souvenirs, notes de lecture. Et puis les dessins s’empilent. Il sont comme des images d’archives : morceaux de vieilles photos recopiées, paysages d’après nature, fantaisies. Ils vivent leur vie, n’illustrent rien, ou à peine un sentiment confus. Ils vont dans la boite à dessins où leur sort demeure incertain. Idem pour les mots, petites lueurs comme des trous sur la page noire. Pourtant ils avancent en ordre dispersé, se collent aux dessins soudain délivrés, et forment des fragments surgis de partout, faits de paroles empruntées et jamais rendues. Isidore Ducasse écrivait : «Le plagiat est nécessaire. le progrès l’implique. Il serre de près la phrase d’un auteur, se sert des expressions, efface une idée fausse, la remplace par l’idée juste.» Merveilleuse clairvoyance. Walter Benjamin n’en dit pas moins : «Les citations dans mon travail sont comme des brigands sur la route, qui surgissent tout armés et dépouillent le flâneur de sa conviction.»

Frederic Pajak, Manifeste incertain. Les éditions Noir sur blanc.

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